Pratiquée lors de l’accouchement dans certaines conditions, l’épisiotomie est une intervention chirurgicale possible qui peut susciter quelques interrogations et appréhensions chez les futurs parents. Qu’est-ce qu’une épisiotomie ? Dans quels cas est-elle pratiquée ?
On vous dit tout.
Qu’est-ce que l’épisiotomie ?
L’épisiotomie est une intervention chirurgicale qui peut être pratiquée lors de l’accouchement pour faciliter la naissance de votre bébé par voie basse. Le ou la professionnel·le qui accompagne l’accouchement incise le périnée (la zone entre le vagin et l’anus) dans le but d’élargir l’ouverture vaginale et ainsi faciliter le passage du bébé.
L’histoire de l’épisiotomie
L’épisiotomie a connu une évolution significative au fil des décennies, reflétant les changements dans les pratiques obstétriques et la compréhension des besoins des femmes pendant l’accouchement.
Elle a été décrite pour la première fois par la sage-femme Felding Ould en 1742 en Irlande. Puis son utilisation s’est progressivement répandue, jusqu’à devenir très fréquente. En effet, en 2000, 70,3% des primipares (premier accouchement) en bénéficient et 33,5% des multipares (grossesses suivantes), soit un taux global de 49,3% : près de la moitié des femmes !
C’est justement dans les années 1990-2000 que de nombreux travaux commencent à montrer que sa pratique systématique n’est pas justifiée, si bien que le Collège National des Gynécologues Obstétriciens Français (CNGOF) rédige en 2005 de nouvelles recommandations sur l’épisiotomie indiquant qu’« une épisiotomie peut être judicieuse sur la base de l’expertise clinique de l’accoucheur » en fonction de la situation obstétricale, mais qu’elle ne doit pas être systématique. L’objectif : passer en dessous des 30%.
Le taux d’épisiotomie descend alors lentement (26,8% en 2010 puis 20,1% en 2016), puis chute soudainement à 8,3% en 2021 ! Aujourd’hui, certains établissements affichent même des chiffres en dessous des 1%.
Bon à savoir : dans les dernières recommandations du CNGOF sur la prévention et protection périnéale en obstétrique de 2018, on peut souligner l’ajout d’un paragraphe non négligeable :« Il est recommandé d’expliquer l’indication et de recueillir l’accord de la femme avant de pratiquer une épisiotomie.»
Les choses ont donc bien changé !
Plusieurs facteurs expliquent cette diminution :
- Les études cliniques : des recherches ont démontré que l’épisiotomie systématique ne prévient pas efficacement les lésions obstétricales du sphincter anal (LOSA), et peut même augmenter le risque de complications telles que l’incontinence et les douleurs post-partum. Ces études ont encouragé une approche plus sélective et individualisée de l’épisiotomie.
- L’amélioration des techniques d’extraction : les avancées dans les techniques d’accouchement instrumental, ainsi qu’une meilleure formation des sages-femmes et des médecins, ont permis de réduire la nécessité d’incisions systématiques. Ces progrès ont également contribué à diminuer le traumatisme périnéal et à favoriser une récupération plus rapide et moins douloureuse des jeunes mères.
- La prise de conscience et autonomisation des femmes : les femmes, mieux informées et plus impliquées dans les décisions concernant leur grossesse et leur accouchement, ont exprimé un désir croissant de minimiser les interventions chirurgicales non essentielles. Cette évolution a été soutenue par des équipes médicales sensibilisées à l’importance du consentement éclairé et du respect des préférences des patientes.
En conséquence, la pratique de l’épisiotomie est devenue plus rare et mieux encadrée, avec un souci accru de respecter l’intégrité physique et le bien-être des femmes.
Pourquoi l’épisiotomie est-elle pratiquée ?
Bien qu’elle soit de moins en moins pratiquée, certaines situations médicales peuvent justifier la pratique de l’épisiotomie.
- Un accouchement instrumental : lorsqu’une assistance instrumentale est requise, comme l’utilisation de forceps ou de ventouses, une épisiotomie peut être nécessaire pour faciliter le passage du bébé et éviter une déchirure sévère (3ème et 4ème degré). Ces instruments sont utilisés pour accélérer la naissance en cas d’anomalies du rythme cardiaque foetal ou lorsque le bébé ne progresse plus dans le bassin.
- Un risque d’hypoxie foetale : s’il y a des signes que le bébé risque de manquer d’oxygène, mais que le périnée de la mère le retient, l’épisiotomie peut aider à accélérer l’accouchement, réduisant ainsi les risques pour le nouveau-né.
Y a-t-il des moyens d’éviter une épisiotomie ?
Oui !
L’épisiotomie étant très “opérateur-dépendant”, il s’agit avant tout de bien choisir l’équipe médicale qui vous accompagne le jour de votre accouchement. Un bon moyen d’éviter une épisiotomie est donc… de vous inscrire dans une maternité qui affiche des taux très bas ! Vous aurez alors la garantie d’être prise en charge par une équipe qui a à cœur de l’éviter tout autant que vous. N’hésitez pas à vous renseigner lors de votre inscription.
Mais alors pourquoi aucune maternité n’affiche 0% d’épisiotomie ? Nous l’avons vu, même en y mettant toute la volonté du monde, il existe encore quelques rares situations qui incitent les professionnels à vous la proposer. En revanche, vous êtes totalement libre de refuser cette prise en charge et le professionnel qui vous accompagne doit respecter votre choix. Veillez simplement à bien comprendre les enjeux pour votre santé et celle de votre enfant, pour faire un choix que l’on appelle éclairé.
Quelle est la différence entre une épisiotomie et une déchirure naturelle ?
Lors de l’accouchement, il est possible de rencontrer deux types de lésions périnéales : l’épisiotomie et la déchirure naturelle.
L’épisiotomie est une intervention chirurgicale réalisée par un·e sage-femme ou un·e gynécologue-obstétricien·ne. Elle consiste à réaliser une incision du périnée pour élargir l’ouverture du vagin et faciliter le passage du bébé. Cette incision concerne généralement la peau, la muqueuse vaginale, ainsi que certains muscles du périnée. L’épisiotomie est suturée immédiatement après la naissance et peut impliquer une période soins post-opératoires pour favoriser une bonne cicatrisation.
En revanche, la déchirure naturelle survient spontanément lorsque les tissus du périnée se déchirent sous la pression du bébé lors de l’accouchement par voie basse. Les déchirures peuvent varier en gravité, allant de superficielles à plus profondes, affectant la peau, le vagin et /ou les muscles périnéaux.
- Les déchirures superficielles (1er degré) : concernent la peau et/ou la muqueuse vaginale, et ne nécessitent pas toujours de suture (à la différence des déchirures plus profondes qui sont suturées pour éviter des complications comme l’incontinence ou des problèmes de sexualité en post-partum).
- Les déchirures du 2ème degré : touchent les muscles périnéaux.,
- Les déchirures du 3ème degré : concernent les muscles qui entourent l’anus.
- Les déchirures du 4ème degré : concernent la muqueuse anale.
D’après les résultats de l’Enquête nationale périnatale, les déchirures du 1er et du 2ème degré représentent 58,8% des cas de déchirures en 2021.
Lorsque vous pratiquez votre préparation à la naissance, n’hésitez pas à aborder ce sujet avec vos professionnel·le·s de santé.
Comment se déroule une épisiotomie : tout comprendre à la procédure
L’épisiotomie est une procédure qui suscite souvent des inquiétudes chez les futures mères. Comprendre les étapes de la procédure peut aider à apaiser ces craintes.
Procédure de l’épisiotomie
Lorsqu’elle est nécessaire, l’épisiotomie est réalisée durant la phase finale de l’accouchement, lorsque la tête du bébé est sur le point de sortir. Voici les étapes clés :
- Préparation : la patiente est placée en position gynécologique pour permettre un accès optimal au périnée. L’équipe médicale, composée d’un·e gynécologue-obstétricien·ne ou d’un·e sage-femme, veille à ce que la future maman soit à l’aise et informée de chaque étape.
- Anesthésie : bien que l’anesthésie locale puisse être utilisée, de nombreuses femmes bénéficient d’une péridurale qui réduit la sensation de douleur au niveau du périnée.
- Incision : l’incision est pratiquée à l’aide de ciseaux chirurgicaux stériles, généralement sur le côté du périnée pour minimiser les risques de déchirure vers l’anus : on parle d’épisiotomie médio-latérale
- Suture : une fois le bébé né, la plaie est suturée avec des fils résorbables afin de permettre la cicatrisation et la récupération post partum.
Quels sont les outils utilisés lors d’une épisiotomie ?
Pour réaliser une épisiotomie, l’équipe médicale utilise des outils spécifiques :
- Ciseaux chirurgicaux : ils sont utilisés pour effectuer une incision précise et contrôlée.
- Aiguilles et fils résorbables : pour suturer l’incision et favoriser une bonne cicatrisation.
- Pinces : pour tenir l’aiguille et manipuler les tissus délicats lors de la suture
Est-ce qu’une épisiotomie est douloureuse ?
L’épisiotomie est une intervention chirurgicale qui est généralement non douloureuse. En effet, que ce soit lors d’un accouchement avec ou sans péridurale, elle est pratiquée lorsque les tissus du périnée sont très étirés (on parle de périnée amplié). Dans cette situation, les terminaisons nerveuses sont peu voire non réceptives, si bien que l’incision n’est pas ou très peu ressentie.
Si cette éventualité vous inquiète, n’hésitez pas à discuter de vos préoccupations avec votre sage-femme ou votre médecin pour recevoir le soutien nécessaire.
Si vous avez des questions sur le sujet, n’hésitez pas à télécharger l’application May. Une équipe de sages-femmes vous répond 7j/7 de 8h à 22h.
Comment récupérer après une épisiotomie ?
Après une épisiotomie, le corps a besoin de quelques semaines pour bien cicatriser. Voici les soins et mesures d’hygiène à adopter pour favoriser ce processus.
Le processus de guérison après une épisiotomie
Généralement, la cicatrisation prend 2 à 3 semaines, mais une guérison complète peut nécessiter jusqu’à 6 semaines. Durant cette période, des soins post-opératoires vous seront recommandés :
- Surveillance de la cicatrice : durant les semaines qui suivent votre accouchement, vous serez amenée à bien faire contrôler votre cicatrice par un·e sage-femme. Cela permet de s’assurer qu’il n’y a pas de signes d’infection ou de complications.
- Hygiène : vous pouvez laver délicatement la zone avec un savon doux, sans colorants ni parfums et sécher en tamponnant doucement et ce quotidiennement
- Lochies : lors des saignements du post-partum, aussi appelés lochies, essayez de changer régulièrement vos protections hygiéniques pour garder la zone sèche et propre.
Conseils pour une meilleure récupération
Pour accélérer votre guérison après une épisiotomie, voici quelques conseils à appliquer :
- Hygiène et soins : en plus de maintenir une bonne hygiène, essayez de laisser la zone aérée autant que possible pour favoriser la cicatrisation. De plus, il est préférable d’éviter tout produit irritant et privilégiez des serviettes hygiéniques sans substances chimiques.
- Alimentation : consommer des aliments riches en vitamines et minéraux favorise la cicatrisation. Les aliments riches en fibres peuvent également aider à prévenir la constipation, réduisant ainsi la pression sur la zone périnéale.
- Activité physique : une fois que votre médecin ou sage-femme vous donne le feu vert, n’hésitez pas à reprendre les exercices légers, comme la marche, pour stimuler la circulation sanguine et améliorer la récupération. C’est également le moment de commencer votre rééducation du périnée pour prévenir les problèmes d’incontinence.
- Repos et écoute de votre corps : accordez-vous du temps pour vous reposer et évitez les activités qui pourraient exercer une pression excessive sur la zone opérée. Écoutez votre corps et ne forcez pas si vous ressentez de la douleur.
Les risques et complications de l’épisiotomie
L’épisiotomie, comme toute intervention chirurgicale, peut entraîner des risques et des complications. Ces complications peuvent survenir à court terme, juste après l’intervention, ou se manifester à plus long terme en post partum.
Complications à court terme
- Douleur et inconfort : la zone d’incision peut être douloureuse pendant les premiers jours suivant l’accouchement.
- Infection : comme pour toute intervention chirurgicale, il existe un risque d’infection de la plaie. Il est important de surveiller les signes d’infection, tels que rougeur, chaleur, ou écoulement suspect.
- Hémorragie : bien qu’elle soit rare, une hémorragie peut survenir suite à une épisiotomie, nécessitant une surveillance étroite par l’équipe médicale.
Complications à long terme
- Sexualité : certaines femmes peuvent éprouver des douleurs ou une gêne lors des rapports sexuels après une épisiotomie, ce qui peut affecter leur sexualité.
- Incontinence : il peut y avoir un risque accru d’incontinence, surtout si l’épisiotomie a été étendue ou si elle a été associée à une déchirure périnéale.
- Cicatrisation : une mauvaise cicatrisation peut entraîner des douleurs persistantes ou des problèmes esthétiques, nécessitant parfois une rééducation périnéale.
Il est important de prendre en compte que ces complications peuvent pour la plupart être résolues avec une bonne prise en charge médicale. Le massage périnéal ainsi que la rééducation périnéale avec un·e sage-femme ou un·e kinésithérapeute permettent d’améliorer la souplesse du périnée ainsi que son rôle de continence. D’autre part, des méthodes existent en cas de douleur persistante, comme la técarthérapie. Si vous observez des complications suite à votre épisiotomie, n’hésitez pas à vous rapprocher d’un·e professionnel·le de santé.
Bien que sa pratique soit moins systématique qu’avant, l’épisiotomie reste parfois nécessaire pour faciliter le passage du bébé lors de l’accouchement par voie basse. Comme toute intervention chirurgicale, il peut y avoir des complications mais qui peuvent être la plupart du temps résolues avec un bon suivi médical. La cicatrisation se fait en général en quelques semaines. Si cette perspective vous inquiète, n’hésitez pas à en discuter avec votre équipe médicale.
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