Le placenta est un organe éphémère, créé tout spécialement par votre corps et l’œuf fécondé pour assurer les échanges entre vous et votre bébé, filtrer le sang qui arrive jusqu’à lui et sécréter les hormones qui permettent à la grossesse de se maintenir. D’ailleurs les cellules du bébé sont tout à fait identiques à celles du placenta ! Incroyable non ?
On parle de placenta accreta lorsque celui-ci est attaché trop profondément à la paroi de l’utérus, créant quelques complications au moment de l’accouchement. On vous explique !
Un placenta accreta, qu’est-ce que c’est ?
Un placenta accreta, c’est lorsque le placenta (organe éphémère de la grossesse qui est normalement implanté dans la muqueuse utérine appelée endomètre) s’est accroché trop profondément jusqu’à atteindre la couche musculaire de l’utérus appelée myomètre : il aura donc du mal à se décoller après l’accouchement, pouvant provoquer diverses complications.
Concrètement, le placenta fonctionne correctement (et remplit donc son rôle de filtre), mais son implantation va au-delà de sa frontière naturelle, la couche de Nitabuch (couche qui se forme à la jonction des couches spongieuses et compactes de l’utérus, c’est à cet endroit que se fera le décollement placentaire).
En France, le placenta accreta concernerait 1 naissance sur 2083 et 1 naissance sur 272 aux Etats-Unis (National Accreta Foundation).
Comment diagnostique-t-on le placenta accreta ?
Souvent, les femmes ayant un placenta accreta ne présentent pas de symptômes particuliers.
Si vous présentez un ou plusieurs des facteurs à risques (listés plus bas) et/ou des saignements au cours du troisième trimestre, les équipes vous feront passer dans un premier temps une échographie (endovaginale ou transabdominale), si besoin doublée d’une IRM pour confirmer les résultats et déterminer plus précisément l’étendue de l’invasion.
Il arrive aussi que le placenta accreta ne soit pas diagnostiqué avant l’accouchement, dans ce cas de figure, trois signes permettent de le détecter le jour J :
- le placenta n’est pas expulsé (phase appelée délivrance) plus de 30 minutes après la naissance du bébé,
- l’équipe médicale n’arrive pas à séparer le placenta de l’utérus avec les mains,
- des saignements très abondants apparaissent.
Quels sont les facteurs de risque du placenta accreta ?
Certaines femmes sont plus susceptibles de développer un placenta accreta que d’autres, car elles cumulent plusieurs facteurs à risque :
- un ou des antécédent(s) d’accouchement par césarienne ou de chirurgie utérine (la cicatrice est susceptible d’avoir entraîné un défaut de reconstruction de l’endomètre),
- un placenta praevia (le placenta recouvre le col de l’utérus),
- un âge supérieur à 35 ans,
- plusieurs grossesses antérieures.
Si une femme présente un ou plusieurs de ces facteurs à risque, elle fera l’objet d’une attention particulière lors des échographies de dépistage : l’échographiste regardera où et comment est implanté le placenta
Si vous avez des questions sur le sujet, n’hésitez pas à télécharger l’application May. Une équipe de sage-femmes et d’infirmières puéricultrices vous répond 7j/7 de 8h à 22h.
Quelles sont les conséquences du placenta accreta lors de l’accouchement ?
Habituellement, le placenta se décolle de la paroi utérine dans les minutes qui suivent la naissance. Ce décollement est favorisé par une contraction de l’utérus, qui peut être renforcée par l’administration d’une dose de 5UI d’ocytocine en intra-veineux, selon les recommandations de l’OMS. La délivrance est un moment clé de l’accouchement car si elle ne se déroule pas correctement, il existe un risque d’hémorragie du post-partum.
Lorsque le placenta est dit “accreta”, il se décolle très difficilement, voire pas du tout, ce qui peut provoquer une hémorragie massive mettant en jeu la vie de la mère.
Devant un placenta accreta, l’équipe médicale peut adopter différents scénarios :
- La tentative de délivrance : grâce à une révision utérine, le praticien peut essayer de décrocher manuellement le placenta. Cette méthode est à haut risque d’hémorragie et doit être évitée si possible.
- Le traitement conservateur : il consiste à laisser le placenta en place et attendre qu’il s’évacue progressivement. Dans ce cas de figure, on surveille de près les saignements de la mère ainsi que sa biologie sanguine pour repérer toute complication. Ce traitement est proposé en particulier aux femmes jeunes avec un désir de grossesse ultérieure mais il est controversé face au risque augmenté d’infection et d’hémorragie.
- Le traitement chirurgical : C’est la méthode la plus recommandée. On pratique une hystérectomie par césarienne afin de retirer l’utérus et donc d’éliminer tout risque d’hémorragie. Cela peut sembler radical mais c’est le choix le plus sûr pour enrayer l’hémorragie et ainsi assurer la sécurité de la mère.
Dans cette optique, la future mère verra différent·e·s professionnel·le·s de santé afin d’anticiper toutes les complications possibles liées à la chirurgie. Elle sera orientée vers une maternité appropriée comprenant une réanimation maternelle, une unité de radiologie interventionnelle (embolisation) et éventuellement un service d’urologie, voire un établissement français du sang (en cas de nécessité de transfusion).
Le placenta accreta est-il dangereux pour la mère et le bébé ?
Le placenta accreta est effectivement une complication de la grossesse, heureusement relativement rare, qui peut se révéler dangereuse pour la santé de la future mère et du bébé.
Pendant l’accouchement
Les femmes ayant un placenta accreta risquent une hémorragie importante et sont donc généralement amenées à subir une transfusion massive. Le risque d’infection ou sepsis, dû à la phase de délivrance retardée, est également plus élevé. Il arrive aussi qu’un placenta accreta amène à une hystérectomie, une hospitalisation prolongée, voire un décès (dans les cas les plus extrêmes et heureusement les plus rares).
Après l’accouchement
Il est possible que certaines parties du placenta restent accrochées dans l’utérus après la délivrance. Un placenta mal expulsé entraîne une gêne pour l’utérus qui doit se contracter afin de fermer les vaisseaux qui irriguaient précédemment le placenta. Si l’utérus est gêné, il saigne et peut provoquer une hémorragie secondaire. D’autre part, il existe un risque que cette partie non expulsée s’infecte et génère une infection de l’utérus par la suite.
Quelle est la différence entre le placenta accreta, increta et percreta ?
Il existe d’autres anomalies du placenta, provoquant les mêmes types de complications le jour de l’accouchement (à des degrés différents) : le placenta increta et le placenta percreta. Cette partie est l’occasion de faire un point sur les différents types de placenta.
- Un placenta “normal” s’accroche à une couche temporaire de l’utérus, celle éliminée au moment de l’accouchement.
- Le placenta accreta adhère plus profondément à la paroi de l’utérus, dépassant la couche de Nitabuch (souvenez-vous, la couche entre la couche spongieuse et la couche compacte de l’utérus) et s’accrochant au myomètre (le muscle utérin).
- Le placenta increta, en plus de s’accrocher directement au myomètre, envahit ce dernier, parfois dans sa totalité.
- Le placenta percreta s’accroche encore plus loin et traverse complètement la paroi utérine : parfois, il envahit même les organes à proximité comme la vessie.
Le placenta accreta augmente-t-il le risque de césarienne ?
En effet, nous l’avons vu, le placenta accreta ne parvient pas à se décoller naturellement de l’utérus au cours de l’accouchement.
De plus, les équipes médicales arrivent rarement à le décoller à la main. Le plus souvent, c’est donc la césarienne programmée qui sera employée pour faire naître le bébé, suivie d’une ablation de l’utérus et du placenta pour limiter les pertes sanguines et préserver la santé de la mère.
Le placenta accreta est une complication relativement rare de la grossesse, qui peut avoir de lourdes retombées le jour de l’accouchement. Heureusement, les professionnel·le·s de santé connaissent bien ce cas et sont prêts à intervenir pour que l’accouchement se déroule au mieux.
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Photo : AnnaStills