Avoir un enfant implique une immense responsabilité pour celui qui va devenir parent. Certaines personnes ne peuvent endosser ce rôle de parent pour diverses raisons. Lorsqu’une grossesse arrive à terme et que la parturiente se trouve dans une telle situation, elle peut choisir l’accouchement sous X.
On vous explique tout sur ce sujet encore tabou dans notre société ⬇️.
Comment se passe un accouchement sous X ?
L’accouchement sous X est le fait de donner naissance en secret. Tout comme un accouchement classique, la mère accouche en maternité mais elle peut rester dans l’anonymat en toute légalité.
Cela nécessite le consentement de la mère à l’adoption qui doit, pour donner ce consentement de façon pleinement éclairée, recevoir un certain nombre d’informations et doit signer un procès-verbal dans lequel peut figurer la ou les raison·s de l’accouchement sous X, des informations sur la santé de la mère et sur l’origine de l’enfant, mais seulement si elle le souhaite. Une fois les papiers signés, l’enfant est déclaré pupille de l’Etat.
Le nouveau-né est ensuite placé sous la protection de l’aide sociale à l’enfance (Ase) pour être mis à l’adoption. Avant cela, la mère dispose toutefois d’un délai de deux mois pour changer d’avis quant à sa décision de ne pas reconnaître l’enfant. Pendant ce temps, le bébé passe par le service pédiatrie ou néonatologie. Il est fréquent que les professionnel·le·s de santé lui créent un album photo pour qu’il puisse avoir des souvenirs de lui tout petit. Ensuite, l’enfant est confié à un ou une assistante familiale (famille d’accueil) ou à une pouponnière.
Est-ce que l’accouchement sous X est légal ?
L’accouchement sous X est légal en France.
La mère biologique peut choisir de communiquer sur ses origines. ou non. On vous invite à poursuivre votre lecture pour découvrir les démarches à faire lorsque l’enfant né sous X souhaite connaître ces informations.
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Quelles sont les raisons qui poussent une femme enceinte à accoucher sous X ?
Avoir un enfant est une énorme responsabilité alors quand une grossesse advient de façon inattendue, il se peut que la femme enceinte seule ou avec son partenaire décident qu’ils ne sont pas prêts à élever un enfant. Parmi les raisons les plus courantes, on peut citer :
➡️ La peur de se faire rejeter par sa famille.
➡️ Ne pas avoir de père biologique.
➡️ Le désir de protéger l’enfant parce que la mère biologique ne peut s’en occuper (problèmes financiers, maladie, ne pas se sentir prêt·e…).
➡️ L’attitude du père biologique.
➡️ Un accouchement inattendu (déni de grossesse).
➡️ Des événements traumatisants.
➡️ Une mère jeune.
Chaque situation est unique. Il existe une multitude de raisons qui poussent les femmes à accoucher sous X.
Quelles sont les démarches pour accoucher sous X ?
Pour accoucher sous X, la femme enceinte doit prévenir les professionnel·le·s de santé de la maternité. Ils·elles ne pourront pas lui demander son identité. On l’a vu, la parturiente doit ensuite signer un procès-verbal.
Quelles sont les conséquences de l’accouchement sous X pour la mère et l’enfant ?
L’accouchement sous X a des conséquences psychologiques pour la mère et pour l’enfant.
Pour la mère il peut y avoir :
- Un sentiment de culpabilité après avoir abandonné son enfant.
- La possibilité de regretter cet acte par la suite.
Bien évidemment, la mère ne reste pas seule, un suivi psychologique et social est proposé par l’Ase.
Pour l’enfant :
- Se sentir abandonné par sa mère.
- De nombreuses questions sur son identité et ses parents.
L’accouchement sous X est bien sûr vécu différemment par chaque femme et chaque enfant. Une fois grands, certains ne souhaitent pas connaître l’identité, ni avoir d’informations sur leurs parents biologiques, d’autres si. Tous les cas de figure sont possibles !
Accoucher sous X est bien entendu une décision extrêmement lourde à prendre, fruit d’une réflexion éminemment personnelle qui met en balance les conséquences d’un accouchement sous X avec celles de garder un enfant dans une situation difficile, voire impossible.
Quels sont les droits du père lors d’un accouchement sous X ?
Le père de l’enfant né sous X est tout à fait en droit de le reconnaître après sa venue au monde. Toutefois, cela doit se faire dans les 2 mois suivant sa naissance (délai aussi valable pour la mère si elle change d’avis). Il suffit alors de se rendre dans une mairie et de montrer sa carte d’identité ou un justificatif de domicile.
Mais il peut arriver que le père n’ait pas toutes les informations à propos de son enfant (par exemple, la maternité où il est né et quand). Dans ce cas, il a la possibilité de saisir le procureur de la République pour récolter les informations manquantes.
Quels sont les services d’assistance disponibles pour les mères accouchant sous X ?
Les mères qui souhaitent accoucher sous X peuvent être suivies par un·e psychologue et par une aide sociale des services de l’Ase.
Quelles sont les démarches pour retrouver ses parents biologiques après un accouchement sous X ?
Qu’on soit adulte ou mineur, il est possible de connaître l’origine de ses parents biologiques après une naissance anonyme. Avant 18 ans, il faut toutefois avoir l’accord d’un·e représentant·e légal·e.
Côté démarches, il faut s’adresser au Conseil National pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP). La personne née sous X doit alors soumettre des pièces et justificatifs d’identité puis remplir un formulaire avec des questions. Vous pouvez le retrouver sur le site service-public.fr.
Ensuite, si la mère et/ou le père biologique ont autorisé l’accès à leur identité ou qu’ils sont décédés et n’ont pas précisé leur souhait de rester anonyme, vous pourrez connaître leur identité et leurs origines ainsi que celles de leurs enfants et petits enfants et enfin la raison de leur choix.
Si le sujet de l’accouchement sous X vous intéresse, le film Pupille réalisé par Jeanne Herry et sorti en 2018 met en image tout ce qu’il se passe après un accouchement sous X. Vous suivez la vie d’un bébé né sous X depuis le jour de l’accouchement à ses 3 ans. De plus, le film a d’excellentes critiques.
Témoignages sur l’accouchement sous X
Les témoignages permettent de nous plonger en profondeur dans un sujet et de le comprendre plus intimement. De plus, ils peuvent être d’une grande aide pour des personnes avec un vécu similaire qui peuvent se sentir moins seul·e·s. C’est pourquoi nous avons décidé de publier les témoignages suivants.
Charlotte a 22 ans, elle est née sous X et nous raconte son vécu ainsi que son ressenti :
“Depuis ma naissance, ma famille d’accueil et mes parents m’ont toujours dit que j’étais née sous X alors même que j’étais bébé ! Certes, un nouveau-né ne comprend pas tout mais je pense qu’en agissant ainsi, cela m’a beaucoup aidé à me sentir comme les autres enfants.
L’importance de la parole
Le fait de ne pas cacher mon histoire m’a vraiment facilité la vie : cela a contribué au fait que je me sente bien dans ma famille. D’ailleurs, ma famille est une famille à part entière ! Je ne considère pas avoir deux mamans, j’en ai qu’une, c’est celle que je connais, celle qui m’a élevé. Et je n’ai qu’un seul papa aussi. Je sais que ça ne se passe pas toujours bien dans les autres familles. Moi, j’ai eu la chance d’avoir des parents ouverts d’esprit dès le départ et qui ont vraiment su quoi faire.
Selon moi, c’est une très mauvaise chose de garder le secret et de ne pas parler de l’adoption à l’enfant né sous X. Quand on apprend, après plusieurs années de vie commune, que notre famille nous a caché un tel secret, c’est une réelle claque. C’est tout de même un grand mensonge qui peut être blessant. Pour que tout se déroule au mieux dans la vie d’une personne née sous X, il est important d’en parler comme mes parents l’ont fait. Après tout, l’adoption est simplement une autre manière d’avoir un enfant, il faut l’assumer et je ne comprends pas pourquoi cela doit devenir tabou. Le principal est d’avancer de manière durable et saine !
Une famille comme les autres
Le fait d’être née sous X me touche, c’est mon histoire après tout. Mais c’est comme si j’avais des parents qui vivaient dans un autre pays. J’en suis fière et je suis surtout fière de pouvoir en parler ouvertement ! C’est important.
Mes parents n’ont jamais fait de différence avec ma petite sœur qui elle, n’a pas été née sous X. Aujourd’hui, c’est comme si ma mère avait accouché de moi. Je suis heureuse de pouvoir montrer qu’on peut très bien évoluer dans la vie avec un départ différent des autres à la naissance. En parlant de différence, j’ajoute aussi qu’il n’y a pas tant de différence entre être un enfant né sous X et un enfant né d’une mère biologique parce que dans tous les cas, cet enfant ne choisit pas sa famille. C’est une question d’état d’esprit.
La possibilité de retrouver ses origines
La loi en France me permet d’accéder à des informations sur mes parents biologiques. D’ailleurs, ils ne m’ont jamais empêché de le faire et restent très ouverts concernant cette démarche. Ils m’ont toujours dit que c’était mon choix et que c’était à moi de prendre cette décision. Honnêtement, je n’ai jamais eu envie de le faire. Tout d’abord, parce que c’est de l’administratif (et dans la vie, il y a déjà assez d’administratif comme ça), ensuite parce que je n’en ai jamais ressenti le besoin. Je me suis toujours sentie extrêmement bien dans ma vie. Peut-être que c’est différent pour d’autres personnes comme moi. Cette envie peut peut-être surgir lors d’une crise d’adolescence, d’un événement important ou de moments de solitude. Je comprends ce besoin de rechercher ses origines, je ne dis pas que c’est mal ! Moi, j’avoue que je me suis identifiée à ma famille. Et ça me va bien comme ça”.
Emmanuelle est infirmière puéricultrice, elle a accompagné plusieurs accouchements sous X en service de néonatalogie et pédiatrie. Elle nous partage son expérience :
“Ce qui m’a toujours marqué dans ces naissances particulières, c’est à quel point comme ces bébés étaient “calmes”… Ils ne pleuraient jamais, ils restaient tout calmes dans leur lit en attendant qu’on s’occupe d’eux. Je crois qu’ils avaient compris qu’ils étaient “entre deux familles” et qu’ils n’étaient pas trop “attendus”.
Un album photo pour créer des souvenirs
Ce sont des enfants qui nous touchent forcément en tant que soignante et à qui nous espérons apporter un peu de douceur. Il est assez habituel dans les services de créer un album photo pour ces bébés dès leur arrivée dans le service et jusqu’à leur départ. Nous capturons plusieurs moments de leur journée, les imprimons et écrivons des petits mots dans l’album pour laisser une trace de ces premiers jours de vie.
C’est une façon de leur dire qu’ils “existent” et ils pourront consulter leur album plus tard et lire tous les mots gentils laissés par les soignant·e·s qui ont pris soin d’eux au début de leur vie. Ensuite, c’est le moment du départ, une équipe de l’aide sociale à l’enfance vient les chercher et l’équipe soignante transmet l’album mais aussi tous les objets qui appartiennent au bébé et disent tout ce qu’ils savent de ses habitudes. Nous avons parfois des nouvelles, parfois pas. Mais nous n’oublions aucun de ces bébés qui étaient hospitalisés dans notre service alors qu’ils n’étaient pas malades mais qui avaient encore plus besoin de nos bons soins”.
Pour aller plus loin 👇
Écrit par Andréa Lepage avec les expert·e·s May.
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Photo : jorditudela